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Jean-Philippe Collard-Neven

Merci à Jean-Philippe Collard-Neven, à ne pas confondre avec le pianiste français Jean-Philippe Collard,  d'avoir répondu aux questions de Piano bleu pour la réalisation de cette page.

Biographie commentée

Jean-Philippe Collard-Neven est né le 2 mai 1975 à Hermalle-sous-Argenteau (province de Liège) dans une famille où l'on avait simplement une oreille musicale..."Mon père jouait du piano "d'oreille" (comment jouer autrement après tout ?). Principalement des morceaux de jazz qu'il avait entendus, enfant, lors de l'intervention américaine à la fin de la seconde guerre mondiale. J'ai appris la musique sur ses genoux, lorsqu'il me faisait répéter après lui les accords et les mélodies des morceaux. Mon grand-père jouait du violon en amateur, de la musique populaire, des chansons, je me souviens de l'air de "la truite" de Schubert. Tout récemment, j'ai réalisé que presque tous les membres de la famille de mon père de son côté maternel pratiquait la musique. Principalement en autodidactes, étant capables de rejouer une musique après l'avoir entendue, accompagnant du cinéma muet...Sinon, je suis le premier à en avoir fait mon métier."
S'il n'a pas le sentiment d'avoir choisi le piano ses propos tendent à montrer le contraire : "Je ne me souviens pas avoir choisi cet instrument. Mon père me raconte toujours que, enfant, lorsque j'étais en présence d'instruments de musique, je me dirigeais toujours vers le piano. Je crois que la morphologie de l'instrument m'attirait. Je pense aussi que j'ai rapidement pressenti qu'il me permettrait d'être autonome. Je trouvais cela fascinant qu'un pianiste puisse produire à lui seul toute une musique qui inclut le rythme, l'harmonie et la mélodie, alors que la plupart des autres instruments ne peuvent remplir que l'un de ces rôles. J'imagine que cela devait convenir à mon tempérament un peu individualiste."

A l'âge de sept ans ses parents l'inscrivent dans une académie de musique, où il suivra toute la filière traditionnelle jusqu'à l'âge de 18 ans.."J'étais en même temps un très bon et un très mauvais élève. Bon car j'obtenais toujours de très bonnes notes, principalement grâce à certaine habileté à camoufler mon absence de travail par la musicalité. Mauvais car je travaillais toujours en toute dernière minute, provocant la récurrente et justifiée colère de mon professeur. Le principal souvenir que je garde de cette période musicale est la grande liberté dans laquelle j'étais laissé. Je passais la plus grande partie de mon temps à improviser et composer. Les morceaux que j'étais censé travailler pour mes cours ne servant que de prétextes à mon imagination, je m'amusais à les transformer, à composer d'autres morceaux dans le même style..."
Hormis avoir envisagé à cinq ans d'être grutier en regardant par la fenêtre de sa classe le chantier de la nouvelle école en construction, Jean-Philippe Collard-Neven n'a jamais eu l'ombre d'un doute sur sa vocation d'être musicien : "J'avais beaucoup d'autres centres d'intérêts (la littérature, la philosophie) mais rien qui ne m'habite aussi fort que la musique." et il entre donc à 18 ans, après ses études secondaires (le bac en poche), au Conservatoire de Liège chez Juliette Poumay-Longrée :"Celle-ci était renommée dans tous les conservatoires de Belgique pour son tempérament volcanique mais aussi pour sa très grande exigence. Lorsqu'elle m'a vu arriver dans sa classe, elle a décrété qu'elle allait me "remettre à l'endroit" ! Il est vrai que mes dix années de piano n'avaient pas constitué une base technique extrêmement solide. Je n'ai pas, comme d'autres, reçu très jeune un enseignement de pointe permettant de s'affranchir très tôt de difficultés élémentaires de la technique pianistique. Je pense que c'est malheureusement souvent le cas. Les premières années au Conservatoire ont donc été particulièrement douloureuses. Mais je ne le regretterai jamais car je pense que ce professeur m'a donné une structure et une exigence qui ont véritablement permis de construire mon travail, en musique classique comme dans d'autres musiques. Sinon, je dois dire que ces années d'études ne m'ont pas laissé un excellent souvenir. C'était une période tourmentée, difficile. Étrangement, je n'ai gardé pour ainsi dire aucun contact avec mes camarades d'alors. Je manquais parfois de nourritures intellectuelles. J'étais passionné par le cours d'analyse qui était donné par le chef d'orchestre Patrick Davin. Chacun de ses cours était une révolution pour moi. Mais j'avais l'impression que la plupart de mes condisciples ne pensaient qu'à bien jouer leurs études et réussir les traits de leurs concertos. Sauf exceptions bien sûr."
Quant à son intérêt pour le jazz précisément, Jean-Philippe Collard-Neven indique : "J'ai depuis l'enfance des standards de "vieux" jazz en tête (Misty, All the things you are...). Quand j'avais 17 ans, un ami batteur m'avait proposé de jouer dans un quartette. Nous avons joué quelques fois à gauche et à droite. Mais en fait, je n'avais pas véritablement de culture jazz. Je ne me préoccupais pas vraiment de la frontière entre les genres (ça n'a pas fort changé). Pour moi, la musique, c'était la musique. Il était tout à fait normal de "zapper" entre une étude de Rachmaninov, une musique de film de Ennio Morricone, une chanson de William Shelller et une improvisation libre. Je ne peux pas dire que le jazz a particulièrement marqué mon enfance ou mon adolescence plus qu'une autre musique. Je n'ai jamais appris le jazz. Hormis quelques leçons avec Diederik Wissels. J'ai bien eu quelques cours à l'Académie de musique lorsqu'ils ont créé une section jazz. Mais les cours étaient assez irréguliers et je n'en garde pour ainsi dire aucun souvenir. Ma plus grande rencontre avec le jazz a été ma collaboration avec le contrebassiste Jean-Louis Rassinfosse, avec qui je joue en duo. Lorsque j'ai commencé à jouer avec lui, j'ai vraiment senti ce que c'était de garder un groove, écouter la basse, laisser de la place à l'autre, construire son improvisation..."

Jean-Philippe Collard-Neven affectionne particulièrement travailler en lien étroit avec des compositeurs et participer à la gestation d'oeuvres écrites à son intention. Son éclectisme l'amène à collaborer avec des personnalités diverses ..."J'ai eu la chance de rencontrer assez tôt de formidable musiciens qui ont laissé une trace en moi. Ainsi Patrick Davin, sous la direction duquel j'ai eu la chance de jouer quelques fois. A 21 ans, j'ai rencontré le violoncelliste-compositeur Jean-Paul Dessy qui a été l'un des premiers par lequel j'ai eu le sentiment d'être "compris" dans toute ma multiplicité musicale. Il m'a rapidement fait entrer comme pianiste à l'ensemble Musiques Nouvelles où je suis resté six ans. Ensuite il y a eu les compositeurs. Michaël Lévinas, Fausto Romitelli, Luc Ferrari, Vinko Globokar, Viktor Kissin, David Shea, Jean-Luc Fafchamps, Philippe Boesmans, Pierre Bartholomée (entre beaucoup d'autres). Les interprètes, l'altiste français Vincent Royer, le quatuor Danel, Paul Declerck, Fabrice Alleman...En fait, pour ma part en tout cas, tout se construit sur les rencontres. Elles nous emmènent là où l'on aurait pas forcément imaginé aller. Parfois j'ai joué la musique de compositeurs que je n'aurais peut-être pas joué si je ne les avais pas rencontrés. Lorsque l'affinité est vraiment grande, on a l'impression de défendre un univers avec lequel on se sent en empathie. J'ai besoin des rencontres pour avancer. Aussi en dehors de la musique bien sûr."
Jean-Philippe Collard-Neven est Premier prix au concours Dexia et en 2003, l'Union des Compositeurs belges lui décerne le trophée FUGA pour son activité en faveur du répertoire belge."La banque Dexia qui organise ce concours continue de me soutenir dans divers projets, notamment discographiques. Le trophée FUGA constituait une reconnaissance du milieu des compositeurs pour mon activité de pianiste en faveur du répertoire belge. Ce n'est jamais désagréable, en même temps, c'est une sensation très abstraite. Je ne peux pas dire que cela a changé quelque chose pour moi si ce n'est que ce genre de coup de pouce est toujours très encourageant."
Il se produit régulièrement comme soliste et chambriste dans différents festivals européens : "En 2007, j'ai donné environ 70 concerts. C'est peu et beaucoup à la fois. C'est peu comparé à certains. C'est beaucoup car il y a de nombreux projets différents. En musique contemporaine, je déchiffre souvent de nouvelles partitions car il est difficile de tourner un même programme. En jazz, l'idée de tournée, surtout après la sortie d'un album, est plus dans les moeurs. Il faut dire aussi que je n'ai pas d'agent et j'assure moi-même la prospection. J'aime bien le contact avec les organisateurs mais c'est un travail éreintant." A la question de savoir quel est son meilleur souvenir de concert il répond : "Il y en a beaucoup. J'aime bien jouer dans des lieux insolites. Nous avons joué avec Jean-Louis dans le patio du Palais Erlanger à Sidi-Bou-Saïd en Tunisie, c'était magique. J'ai aussi joué dans les Salines d'Arc et Senans à côté de Besançon. Le plus souvent, les concerts restent dans ma mémoire lorsqu'un échange fort se produit avec le public. Pendant le concert mais également après."
Quant aux concerts à venir, nombreux lui tiennent à coeur :"Je pars jouer l'Euro Jazz Festival de Mexico en mars avec Jean-Louis. J'ai un récital solo le 19 avril dans la grande salle de Flagey (Studio 4) pour le Festival Ars Musica. J'y jouerai la musique de John Adams, Steve Reich, Conlon Nancarrow et une création mondiale de Jean-Luc Fafchamps. Ce sera un programme un peu plus "rock" et qui me tient très à coeur. Le 9 février j'ai un très beau concert à la philharmonie de Cologne autour de la thématique du tango. Stravinski, Satie, Ferrari, Cage et bien sûr Piazzolla. J'y serai en compagnie de Vincent Royer, de Krassimir Sterev (un génie bulgare de l'accordéon) ainsi que des membres de l'orchestre de l'opéra de Cologne. Je vais également faire une tournée en solo avec notamment des oeuvres de Pierre Bartholomée, Mantovani, Janacek, et qui m'emmènera en Chine, au Japon, en Suisse, Autriche, Canada, Allemagne... En novembre, je ferai quelques concerts en soliste avec le magnifique Collegium Vocale dans des oeuvres de Liszt (le Via Crucis et des extraits des Harmonies poétiques et religieuses) sous la direction de Patrick Davin."
S'il est belge, les occasions de jouer en France ne manquent pas à Jean-Philippe Collard-Neven :"J'ai joué au festival Présence de Radio France, à Musica Strasbourg, au Festival Agora de l'Ircam, Why Note à Dijon, les Nuits Bleus d'Arc et Senans, à Lille, au Centre Wallonie-Bruxelles à Paris, à l'Opéra de Nice, à la salle Varése du Conservatoire de Lyon, à l'Archipel à Paris, au centre culturel de Rambouillet... Je suis invité en novembre au festival Musiques Démesurées à Clermont-Ferrand. Je jouerai aussi la musique de Bruno Mantovani dans différents festival français en 2009."
Jean-Philippe Collard-Neven est également professeur de Musique de Chambre et d'improvisation au Conservatoire Royal de musique de Mons, une activité au sujet de laquelle il est très bavard :"L'enseignement est un réel échange. Le professeur amène son expérience, sa réflexion, son envie de faire avancer les autres dans la mesure de ses moyens. L'étudiant apporte son énergie, son envie d'apprendre. Plus son exigence est grande, plus nous devons creuser en nous-même pour donner exactement ce dont il a besoin. Cela occasionne parfois des réflexions très intéressantes dans lesquelles nous sommes poussés dans nos retranchements. Il y a beaucoup de doutes aussi dans le métier d'enseignant. Je crois que le meilleur enseignement se fait sur le long terme. Je ne pense pas que nous soyons là pour donner des "trucs" ou des "ficelles" pour résoudre rapidement des petites problèmes de jeu. Il y a parfois un tout petit peu de cela, mais si je dois me souvenir de ce que j'ai moi-même reçu, il s'agit toujours de conseils que je n'ai compris que bien longtemps plus tard. C'est d'ailleurs très ingrat pour le professeur car, bien souvent, quand les leçons portent leurs fruits, il n'est pas là pour le savourer.
En fait, je pense qu'un musicien doit être fondamentalement autodidacte. Il doit tendre vers l'autonomie et faire en sorte de pouvoir se débrouiller tout seul. J'ai la conviction que ce n'est pas entre les quatre murs d'une classe que l'on apprend le mieux la musique. Tout au plus, on y apprend à réussir des examens et à se formater aux exigences des concours. En même temps, je n'ai pas de système miracle alternatif. Je crois qu'un élève profondément musicien parvient toujours à se faufiler entre les mailles d'un système pédagogique pour en prendre le meilleur et remplir sa besace des informations qui lui semblent nécessaires. C'est d'ailleurs une attitude qu'un musicien conserve toute sa vie. C'est au contact d'autres musiciens que l'on grandit, en "vampirisant" un peu leur expérience et leur savoir-faire. Le professeur doit jouer ce rôle. Mais il doit tendre à ce que l'élève n'aie plus besoin de lui. Trop souvent, on voit des pédagogues qui tissent autours de leurs "poulains" une toile dont ceux-ci ne peuvent se dépêtrer car tout est fait pour leur faire croire qu'ils ne seront plus rien s'ils quittent le giron du Maître.
L'enseignement, pour moi, constitue également un contrepoint très agréable à ma vie de concertiste. J'amène au Conservatoire l'énergie de ma vie musicale, et les étudiants eux-mêmes me donnent souvent beaucoup d'élan. Aussi parce qu'ils représentent l'avenir et que certains vont sans doute nous dépasser
."
Jean-Philippe Collard-Neven a nombreux projets en route : après un premier cd salué par la presse internationale, il vient de sortir un nouvel album, Second Move, avec le contrebassiste de jazz Jean-Louis Rassinfosse(voir plus bas) et le duo est actuellement en tournée. Celle-ci les conduira entre autres au Festival de Jazz de Mexico en mars 2008. Vient de paraître également un double cd/dvd consacré à Luc Ferrari chez Sub Rosa avec l'altiste français Vincent Royer et il sortira en avril 2008 un cd consacré à la musique de chambre de Jean-Luc Fafchamps avec l'altiste Vincent Royer, le clarinettiste Jean-Michel Charlier et le quatuor Danel.
Actualité :
A voir une nouvelle vidéo du pianiste/compositeur Jean-Philippe Collard-Neven
Jean-Philippe Collard-Neven - 'Falling Star 3' d'un disque à sortir aussi prochainement en France, car pour le moment on peut apprendre que "après une tournée de 9 dates au Japon en juin 2011, ce nouveau projet est présenté pour la première fois en Belgique. “Depuis longtemps s'accumulent dans mes tiroirs des bouts de me?lodies, des morceaux a? moitie? finis, quelques accords jete?s sur le papier. Peut-être parce que je ne savais pas dans quelle case les mettre. Ni jazz, ni musique contemporaine, ni pop, ni chanson... En fait, c'est exactement la musique qui me vient en marchant dans la rue, en roulant en voiture quand je ne pense a? rien, une musique qui arrive toute seule sans qu'on lui ait rien demande?. Et c'est tellement irrésistible car cela me ramène à mon enfance, mon adolescence. Nostalgie joyeuse d'un monde disparu. Comme une porte vers un ailleurs qui nous échappe sans cesse, ces musiques tentent de voir derrière l'apparence du monde autre chose que nos yeux ne peuvent plus voir, de lire entre les lignes ce qui n'est pas dit mais que nous pouvons percevoir, si nous savons l'entendre.”

Ses compositions, ses différentes réalisations...

Pianiste inclassable, Jean-Philippe Collard-Neven pratique toutes les musiques : "De manière générale, tous les genres m'intéressent. C'est surtout une question de personnes et de rencontres. Parfois on reste hermétique à une musique parce qu'il nous manque une clé d'accès. C'est souvent une rencontre, un voyage ou le hasard qui nous permet d'y accéder. En fait, j'aime beaucoup les musiques qui ne sont pas facilement classables. Je ne suis un puriste dans aucun domaine. Je pratique avec un même bonheur la musique classique, contemporaine, jazz, rock, pop, electro, chanson, expérimentale, world..."
Quant à révéler sa source d'inspiration Jean-Philippe Collard-Neven confie :"Mes sources d'inspiration sont très abstraites. Difficiles à décrire. J'aime bien composer pour des interprètes précis. Je peux alors entendre leur son, leurs inflexions et composer en intégrant cela. J'ai l'impression que ce qui précède la composition, chez moi, a un rapport avec une certaine qualité d'énergie, de concentration, d'ouverture au monde, d'état d'âme. Je n'ai pas envie de faire une musique élitiste. Quand je compose, je m'efforce de rentrer en moi-même aussi profondément que je le peux et j'arrive alors à des états qui me permettent d'entendre une musique que je n'aurais pas entendu sans cette introspection. Finalement, c'est toujours lié au rapport intérieur-extérieur. "
Compositeur mais aussi interprète Jean-Philippe Collard-Neven a travaillé avec de très nombreux compositeurs de musique contemporaine : " Je me souviens du choc de la découverte de Giacinto Scelsi pendant mes études. J'ai d'ailleurs fait mon mémoire sur la suite n°8 Bot-Ba que j'ai joué il y a deux ans au festival Ars Musica. Vers la fin de mes études, j'ai eu le sentiment que la musique contemporaine constituait un formidable espace de liberté et de création. Un espace vierge de préjugés contrairement à la musique classique dont tous les chefs d'oeuvres sont joués et rejoués à outrance. Je ne supportais pas que l'on ne puisse pas jouer une sonate de Beethoven sans que l'on vous compare à 36 autres versions. Aujourd'hui, je suis moins préoccupé par la question mais à l'époque, cela me gênait beaucoup. J'adorais aussi rencontrer les compositeurs. A Liège, mon professeur de musique de chambre, Cécile Evrard, était très active. Elle organisait de nombreux concerts et nous mettaient en contact avec des compositeurs. Claude Ledoux, Viktor Kissin, Michel Fourgon... Elle m'a aussi fait jouer Tristan Murail, Messiaen... "
Son entrée à l'âge de 22 ans à l'ensemble Musiques Nouvelles lui a donné également nombreuses opportunités de rencontres avec les compositeurs contemporains :"J'y ai véritablement appris un métier. Il fallait lire des partitions très vite. Souvent, les compositeurs finissaient de composer très en retard. Il y avait beaucoup de stress mais c'était un travail très excitant et exaltant. J'avais la sensation de faire quelque chose d'utile. Donner vie à des oeuvres qui n'avaient jamais été jouées. Nous avons joué à Madrid, Varsovie, Strasbourg, Paris, Bruxelles, Milan..."
Ensuite ayant quitté l'ensemble "Musiques Nouvelles" pour privilégier ses projets personnels, Jean-Philippe Collard-Neven a joué alors principalement en solo et en duo avec l'altiste français Vincent Royer :"Avec Vincent, nous avons passé des commandes à différents compositeurs : Suzanne Giraud, Viktor Kissin, Jean-Pierre Deleuze, Jean-Luc Fafchamps, David Shea, Luc Ferrari, Michael Riessler, Fabrizio Cassol... Nous ne jouons que les oeuvres écrites pour nous. Nous avons enregistré deux cd's: The Book of scenes, de David Shea. David est un compositeur new-yorkais, découvert par John Zorn et actuellement une figure de proue de la musique électronique. Il a composé pour nous un grand ensemble de pièces. Il joue avec nous au sampler sur le cd et sur scène. Le deuxième cd est consacré aux oeuvres que Luc Ferrari nous a écrites. C'est une magnifique rencontre que nous avons faite avec Luc. C'est Vincent qui l'avait rencontré à Chicago et qui l'avait convaincu d'écrire pour nous. Je dois avouer qu'au départ, je ne connaissais pas bien sa musique. Une très belle amitié est née dans cette collaboration, avec son épouse Brunhilde aussi. Nous avons enregistré le cd dans les mythiques studios de la radio de Brême mais nous avons achevé l'enregistrement à Paris car la santé de Luc ne lui permettait pas de se déplacer jusqu'en Allemagne. Lors de l'enregistrement à Paris, une équipe de cinéastes, Guy-Marc Hinant et Dominique Lolay, a réalisé un film sur Luc. Nous avons édité un coffret qui comprend le cd et le dvd édité chez Sub Rosa. C'est particulièrement cher à nos yeux car Luc est décédé un mois après le tournage de ce film en notre compagnie."

En solo, Jean-Philippe Collard-Neven joue régulièrement le répertoire contemporain :"J'ai d'abord eu une prédilection pour ce que l'on appelle le courant "spectral". On ne peut jamais enfermer une musique dans un concept, mais ce terme se rattache à la musique composée à partir des années 70 part des gens comme Tristan Murail, Gérard Grisey, Michaël Lévinas. Il y a eu aussi un courant spectral en Roumanie dès la fin des année 60 avec Horatiu Radulescu et Iancu Dumitrescu notamment. Ces compositeurs ont fort marqué la génération suivante. Ils étaient eux-mêmes très nourris de la musique de Scelsi, Messiaen... J'ai beaucoup évolué dans cet univers-là. Mais j'ai aussi joué la musique de Luigi Nono, Claude Vivier, George Crumb, Jonathan Harvey, Steve Reich... Aujourd'hui, je me sens très proche de la musique de Bruno Mantovani dont je vais souvent jouer la musique prochainement."
Mais Jean-Philippe Collard-Neven n'en délaisse pas pour autant le répertoire classique :"Depuis quelques temps, je me suis tourné à nouveau vers le répertoire romantique. Je forme depuis un an un duo avec l'altiste Paul Declerck et nous jouons pour l'instant Schumann, Brahms et Liszt. Nous avons le projet également de jouer l'adaptation par Liszt de Harold en Italie de Berlioz. C'est extrêmement rafraîchissant de revenir à ces musiques "civilisées" après des années de répertoire contemporain. J'ai enfin le sentiment de réentendre ces oeuvres autrement.
Je n'ai pas de compositeur préféré. J'ai toujours eu un très grand amour pour Ravel dont la musique recèle une tendresse immense. J'adore également Schubert, Janacek, les dernières oeuvres de Brahms...Ces musiques m'ont évidemment influencé mais au même titre que tous les autres genres musicaux que j'ai fréquenté. Je ne me sens pas plus musicien classique que non classique
."
En ce qui concerne le jazz, ses pianistes de références sont :"D'abord Egberto Gismonti - que j'admire aussi comme compositeur - Mario Laghina qui joue et compose pour la chanteuse portugaise Maria Joao; Lyle Mays, pianiste de Pat Metheny; Stefano Bollani; Michel Petrucciani... Et beaucoup d'autres évidemment. De manière générale, je suis très sensible au lyrisme. J'aime aussi les pianistes dont le jeu dégage de la joie, de l'énergie, de la générosité. Malgré ma culture contemporaine, je ne suis pas trop porté sur le jazz plus expérimental, ou dans lequel la complexité ou l'intellectualité prend le pas sur la communication. "
Il considère le contrebassiste Jean-Louis Rassinfosse comme son "parrain en jazz" : "Nous nous sommes rencontrés il y a cinq ans dans le groupe d'Oscar Beek. C'était une période ou je ne jouais presque plus de musique non classique et j'avais le souhait de monter un groupe. J'en ai parlé à Jean-Louis. Nous nous sommes vus pour improviser un peu ensemble. Après un moment, il m'a dit : pourquoi ajouter d'autres musiciens, on est très bien à deux ! Effectivement, cela s'est vérifié puisque nous jouons ensemble depuis lors et la formule ne s'épuise pas. Jean-Louis m'a apporté beaucoup de confiance. Il n'a jamais été didactique malgré notre différence d'âge et son immense expérience. C'était tellement grisant pour moi de jouer avec ce partenaire privilégié de Chet Baker, Philippe Catherine, Toots Thielemans, Joe Lovano, Slide Hampton...! Il m'a poussé à donner le meilleur de moi-même, à clarifier mon langage, ma perception du rythme, mon écoute. Il m'a appris à jouer peu, à retenir plutôt que tout donner sans cesse, à ménager mon énergie. Il est un peu mon parrain en jazz. Ce qui est riche dans notre rencontre, c'est notre ressemblance au-delà de nos différents parcours. Finalement, nous avons complètement oublié que nous venons de différents mondes."
Par ailleurs, Jean-Philippe Collard-Neven consacre une large partie de son travail à des collaborations avec le théâtre en tant que compositeur, arrangeur et improvisateur. Il compose des musiques de scène pour les spectacles, domaine au sujet duquel il a beaucoup de choses à dire aussi : "J'ai toujours été fasciné par l'association de la musique avec d'autres formes d'expression. Principalement le cinéma, mais aussi le théâtre. Durant mes études, j'étais souvent plus proche des comédiens que des musiciens. Je passais beaucoup de soirées avec eux et de fil en aiguille, j'ai participé à divers spectacles. Cela allait du cabaret Boris Vian aux pièces radiophoniques de Samuel Beckett en passant par Brassens. Depuis, je n'ai jamais cessé de composer pour le théâtre.Ma compagne, Geneviève Damas, est comédienne, metteur en scène et écrit pour le théâtre. J'ai composé plusieurs musique de scène pour elle. Les dernières en date étaient pour ses spectacles Molly à vélo (prix du meilleur auteur 2005), et Molly au Château, tous deux créés au Festival de Spa et repris ensuite au Théâtre Jean Vilar et dans beaucoup d'autres lieux. J'ai écrit également pour le théâtre pour enfant, qui est très vivace en Belgique. J'ai également composé une musique pour le spectacle "l'Installé" de Alain Spièss mis en scène par Françoise Spièss au Théâtre Daniel Sorano de Vincennes. Ce qui m'intéresse dans ce travail, c'est de me fondre dans la vision d'un metteur en scène. Puiser dans des éléments extra-musicaux (texte, décors, dramaturgie) des sources d'inspiration pour la musique. J'aime bien lorsqu'un metteur en scène me pousse à composer une musique que je n'aurais jamais trouvé par moi-même.
Le dernier spectacle pour lequel j'ai composé était Molly au Château de Geneviève Dams au mois d'août 2007. C'était une suite d'un autre spectacle qui avait remporté un large succès.
C'était une véritable suite au sens littéraire. Pas une sauce que l'on tente de rallonger. La mise en scène était, comme pour Molly à vélo, de Pietro Pizzuti, lui-même auteur, comédien et metteur en scène. Pietro a une très grande sensibilité musicale. Il a joué sous la direction de Béjart mais aussi d'Ingrid von Wantoch Rekowski qui est une grande spécialiste du théâtre musical.
Avec lui, le travail va très vite et très facilement. On se comprend sans parler. On discute un peu avant le début des répétitions. Je savais que j'allais en partie réutiliser le matériau musical du premier spectacle mais je voulais aussi entraîner cette musique ailleurs. C'est difficile d'en parler sans s'étendre sur le propos de la pièce."
,Jean-Philippe Collard-Neven travaille presque toujours en assistant aux répétitions. Il essaye ainsi de comprendre le rôle que pourrait jouer la musique dans le spectacle :"Ce rôle est toujours différent. Je cherche principalement à ce que la musique soit un réel contrepoint à l'action. Elle peut servir par exemple à exprimer ce qui n'est pas dit par un personnage. Elle peut aussi créer un décalage dans une situation. Je pense toujours à la chanson "What a wonderful World" d'Armstrong sur les images de guerre dans le film Good Morning Vietnam. Lorsque je commence à me faire mon idée, je cherche le "son" du spectacle. L'univers musical dans lequel je vais le baigner. C'est très délicat car la musique peut totalement changer la perception d'un texte. Quand c'est réussi, c'est formidable. J'enregistre alors dans mon propre studio des maquettes que j'apporte ensuite sur le plateau pour les tester dans le jeu. Souvent, il faut ajuster certaine choses, le timing, décaler telle modulation, anticiper un changement de tempo... Parfois, au contraire, le metteur en scène - ce fut le cas de Pietro sur Molly au Château - ajuste le jeu à la musique. C'est alors très agréable car là, il y a une véritable rencontre entre la musique et le théâtre. Lorsque le jeu se nourrit aussi de la musique. Il faut savoir qu'historiquement, la musique a souvent servi d'intermède luxueux entre les scènes et les changements de décors. Même si au TNP, Jean Vilar avait comme compositeur un certain Georges Delerue qui composait la musique à la minute pour un petit orchestre qui se tenait là, à attendre les partitions. Pour Molly au Château, j'ai utilisé le piano, le clavecin et le Rhodes Fender que j'ai superposé en "multi-pistes".
Jean- Philippe Collard-Neven participe également à des rencontres danse-musique :"J'adore ces rencontres. Concernant la danse, mes plus belles expériences auront été avec le danseur-chorégraphe anglais Julyan Hamilton et le contrebassiste américain Barre Philips. Ils travaillent énormément ensemble et ont développé un langage musico-chorégraphique commun très fort. Ca a été une expérience très marquante de les fréquenter. Sinon, je n'ai pas encore développé de projet personnel avec la danse. Ce n'est pas l'envie qui me manque mais le hasard des rencontres..."
Jean-Philippe Collard-Neven a aussi réalisé nombreux arrangements de musique de chansons françaises..."Depuis le Conservatoire, j'accompagne de la chanson. J'aime par dessus tout arranger et transformer une chanson à l'extrême, m'approprier leur musique pour en faire autre chose. C'est une forme très agréable à jouer et dans laquelle le rapport texte-musique est passionnant. C'est toujours un challenge très grand de dire énormément de choses en 5 minutes. Avec Oscar Beek, nous jouons depuis quelques années (chant, accordéon, contrebasse, guitare, violon, clavier, choeurs) et nous avons trouvé une belle complicité. Un nouvel album est en train de se préparer.
Avec Zoé, cela a été une courte rencontre le temps d'une tournée au Canada. Une magnifique chanteuse au tempérament de feu, dotée d'une voix peu commune.
Ann Gaytan est une chanteuse assez atypique qui a été très marque par son amitié avec Léo Ferré. Ils ont chanté ensemble, il a composé pour elle. Elle m'avait appelé à l'occasion d'un spectacle en hommage à Ferré, en présence de sa veuve, en France. Le projet s'est très bien passé, très émouvant.
J'ai ensuite participé aux concerts qui ont suivi la sortie de son nouvel album. Récemment, je l'ai également accompagnée à Paris dans un concert consacré à l'écrivain Marcel Moreau. Jean-Claude Drouot lisait des textes et ensuite elle chantait ses textes mis en musique.
Avec le groupe Vénus, ce fut une très belle expérience. Le groupe qui connaissait alors un très grand succès s'était entouré d'un petit orchestre de chambre dont je faisais partie (clavecin et piano électrique). C'était au Cirque Royal à Bruxelles devant plus de mille personnes dans une atmosphère électrique que nous avons joué. Il existe un cd "live" de ce concert
."
Il vient également d'achever de composer une musique pour le documentaire "l'Or Bleu" de Damien de Pierpont et qui sera diffusé entre autres sur Arte et RTBF. "L'Or Bleu est un documentaire de Dominique de Pierpont sur la privatisation de l'eau au Maroc. Il parle de la problématique des villes qui ne peuvent plus faire face à la gestion de leur eau, notamment en raison de l'accroissement du tourisme et de la demande d'eau, et donc de la gestion de celle-ci et de la maintenance des infrastructures servant à la distribuer. Les villes font alors appel à des sociétés privées telles que Veolia ou la Lyonnaise des Eaux (Suez) qui, à elles deux, gèrent l'eau dans plus de 150 pays, une situation de quasi monopole.
j'étais déjà sensible à ce sujet. J'avais même, il y a quelques temps, ponctué de musique une conférence de Ricardo Petrella. Le producteur de ce documentaire, Denis Delcampe, m'a contacté très peu de temps avant le mixage final car il n'était pas prévu de musique au départ, mais à ce stade du travail, il a estimé que ce serait finalement nécessaire. Ce travail était passionnant et délicat. Il fallait peu de musique car elle ne devait en aucune manière adoucir le propos.
Le documentaire est constitué principalement d'interviews des différents protagonistes, entrecoupées d'images d'enfants transportant de l'eau dans le désert, de fontaines publiques (qui risquent d'être fermées!), ainsi que des images de centres de vacances et de terrains de golf dans lesquels l'eau coule à profusion. La musique est la voix de l'eau. Au mixage, l'ingénieur son a subtilement mélangé les bruissements de l'eau avec la musique, comme si celle-ci émanait de l'élément liquide.Ce fut une très belle expérience pour moi car la musique de film est mon rêve d'enfant.
"

Après ce long aperçu sur le travail de Jean-Philippe Collard-Neven il n'est pas surprenant qu'à la question de savoir quels sont sont ces autres centres d'intérêts il réponde : "La musique me prend énormément de temps. Celui qui me reste, je le consacre à ma fille qui a 2 ans, à mes amis, la famille. J'aime lire et j'adore le cinéma. Je suis aussi un grand fan de bandes dessinées. Il y a des choses formidables qui se réalisent dans ce domaine aujourd'hui. Et bien sûr, avoir un enfant et une famille a beaucoup d'incidence sur la musique. La musique n'est pas plus importante que la vie !"

Ecouter...

Second Move
Jean-Louis Rassinfosse, contrebasse
Jean-Philippe Collard-Neven, piano

Voilà cinq ans que le pianiste/compositeur Jean-Phlippe Collard-Neven et le contrebassiste Jean-Louis Rassinfosse jouent ensemble en duo, une formule qui leur convient bien, comme l'explique Jean-Philippe Collard-Neven qui a bien voulu répondre à nombreuses questions : "Le duo, et particulièrement le duo sans batterie, est une formule qui laisse énormément de place pour le jeu. Chaque note compte. C'est aussi une formule sans filet. Il n'y a pas une section rythmique sur laquelle vous pouvez vous appuyer. Si vous flanchez dans le groove un instant, cela s'entend immédiatement. C'est très exigeant mais très agréable. Pour un pianiste, apprendre à laisser de la place à la basse est vraiment indispensable. Cela demande un travail délicat de la main gauche. Une conscientisation de tous les choix harmoniques et mélodiques. Avec Jean-Louis, je sais que sur certains accords, je dois éviter telle ou telle note car il aime broder autour et il ne faut pas créer de conflits ou de tensions maladroites. parfois dans le jeu, on a vraiment l'impression d'entrer dans la pensée de l'autre. Ce sont des moments d'extase articulièrement magiques."...cliquez ici pour lire la suite

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