Poème mystique BLOCH PART Elsa Grether Violon Ferenc Vizi Piano

Poème mystique
BLOCH PART
Elsa Grether, Violon
Ferenc Vizi, Piano

Ernest Bloch (1880-1959)
Sonate n°2 pour violon et piano, poème mystique
Nigun, extrait de Baal Shem ( Trois images de la vie de chassique)
Sonate n°1 pour violon et piano
Arvo Pärt (1935)
Fratres (version pour violon et piano)

Contrairement à ce que pourrait laisser imaginer la photographie qui illustre ce disque outre la violoniste Elsa Grether, dont c'est ici le premier disque, un pianiste joue aussi l'ensemble des oeuvres, un pianiste que les internautes de piano bleu connaissent déjà : Ferenc Vizi, mais il n'apparaît pas sur l'illustration pas plus qu'à l'intérieur du livret d'ailleurs. Oui on se demande parfois pourquoi les labels choisissent de ne mettre à l'honneur sur la pochette que l'un des deux musiciens de telles sonates avec instrument à cordes alors que l'autre musicien a aussi un rôle important et que le public potentiellement intéressé par le disque serait plus large... Cependant pour ce qui concerne ce disque on trouvera peut-être une partie de réponse ou d'explication dans celles données par le pianiste qui a bien voulu aussi s'exprimer à l'occasion de la sortie de ce disque : c'est Elsa Grether qui a entièrement conçu le programme de l'enregistrement et il n'est pas impossible que lui-même n'aurait peut-être pas fait les mêmes choix car il a une préférence pour la première sonate de Bloch, sonate que le compositeur lui-même conseillait de jouer juste avant la seconde, c'est donc un disque avant tout d'interprète mais qui a le grand mérite de nous faire découvrir des oeuvres d'un compositeur peu réputé : Ernest Bloch. Elsa Grether, qui explique dans le livret que son disque est né précisément d'un véritable coup de coeur pour les sonates de Bloch, a d'ailleurs pu jouer certaines de ces oeuvres accompagnées d'autres pianistes, il ne s'agit donc que d'un duo presque "occasionnel", comme souvent en musique de chambre, mais c'est donc ici à Ferenc Vizi qui a souvent joué ces oeuvres avec la violoniste lors de concerts depuis leur rencontre en 2008, qu'est donc revenu la partie pour piano. Il semblait donc logique de l'interroger aussi sur ce disque... dont le programme original et intéressant mérite toute attention même des amateurs de piano !
L'auteur du livret, Harry Halbreicht indique que Ernest Bloch, qui est surtout connu pour son triptyque pour violon et piano "Baal Shem, trois images de la vie chassique" dont le volet central "Nigun" inclus dans ce disque est un bis populaire, "est de fait surtout connu comme représentant le plus célèbre d'un style musical spécifiquement "juif" bien qu'il ne fasse jamais appel à des mélodies traditionnelles et que pourtant ces pages "juives" ne représentent qu'à peine un cinquième de son oeuvre". C'est presque à la même époque qu'il a composé ses deux sonates pour violon et piano , écrites à quatre ans d'intervalles ( 1920 et 1924) et qui selon l'auteur du livret "constituent un diptyque fortement contrastant et en fait complémentaire, au point qu'il considérait qu'elles devaient être jouées à la suite l'une de l'autre" ... un choix que n'a donc pas fait la violoniste Elsa Grether qui a aussi souhaité ajouter une oeuvre d'Arvo Pärt, d'esprit méditatif comme la seconde sonate de Bloch. Il est vrai aussi que, à son époque, Ernest Bloch, avec une oeuvre aussi extrême que la sonate n°1 sentit qu'il avait dépassé les limites de son public et de ses interprètes et que c'est après qu'elle eut une fois de plus rencontrée l'incompréhension, qu'il décida d'écrire la seconde sonate de caractère plus détendue et plus paisible, explique encore l'auteur du livret.
Près d'un siècle plus tard, sans doute le public, qui a désormais l'habitude d'écouter des oeuvres du vingtième et du vingt-et-unième siècle, musique reflet aussi d'un monde plus agité, serait tout à fait apte à rentrer immédiatement dans l'agitation et le climat de révolte de la première sonate ( le compositeur lui -même la qualifiait de "tourmentée, écrite peu après la terrible guerre et la terrible paix, pressentant clairement la menace d'un second conflit mondial pire que le premier") , mais ce n'est pas le choix artistique de la violoniste qui a donc préférer jouer en premier lieu la sonate n°2, qui donne aussi le titre à ce disque "Poème mystique" , une seconde sonate qui montre, selon le compositeur, "le monde tel qu'il devrait être et que nous le rêvons", une expression de foi, d'espérance et de ferveur, ce titre "poème mystique" est du à sa forme d'un seul tenant et non trois mouvements comme la première, et au fait que c'est une oeuvre d'essence spirituelle avec des mélodies juives et des citations de chants grégoriens. En fin de programme la violoniste a choisi de revenir à ce climat méditatif par le biais de "Fratres" d'Arvo Pärt qui date de 1980 dans sa version pour violon et piano. Ernest Bloch a dit que la première sonate avait dépeint quant à elle" le monde tel qu'il était , comme la lutte frénétique de forces conflictuelles primaires et aveugles"... l'oeuvre de Pärt est une réponse apportée par la violoniste, celle-ci offrant un programme qui appelle donc plus au rêve mystique qu'à la réalité terrestre sans l'oublier cependant puisque la première sonate, effectivement plus intéressante et plus marquante, est heureusement au coeur du programme. Ce premier disque d'Elsa Grether, disque dont le mérite est certes avant tout de faire apprécier le talent de la violoniste, rempli totalement son rôle en permettant de nous faire découvrir sa grande musicalité, son jeu passionné et d’une intense poésie, bref son talent incontestable, un talent qui lui permet de rêver à juste titre d'un monde terrestre meilleur, car où chacun aura aussi un réel plaisir de continuer à suivre la concertiste, lauréate de diverses fondations et également professeur de violon au CRR de Reims, tout comme celui de suivre le pianiste Ferenc Vizi, dont comme le dit fort bien Elsa Grether : " le jeu inspiré, profond, fluide et chaleureux est un bonheur", et cela tant dans leurs autres projets respectifs que communs !
Dans quelle circonstance avez-vous rencontré Elsa Grether et adhéré à son projet de disque « poème mystique »
Ce n'était aucunement dans une perspective professionnelle, utile, pour un projet particulier. J'avais, et j'ai toujours, juste envie de connaître des musiciens, de la même façon que d'autres se font des soirées ciné pizza , on pourrait faire des soirées de musique, improvisées, avec un plaisir de fervent amateur, lequel après une journée d'un travail qui ne le passionne pas forcément retrouverait son grand plaisir : faire la musique entre amis ! Alors , étonnant, mais malgré mon passage au Conservatoire je ne m'étais pas beaucoup lié à d'autres instrumentistes donc , ça vous étonnera mais c'est la pure vérité : j'ai tapé sur google violoniste français , j'ai fait une recherche des vidéos sur le sujet et suis tombé sur Elsa jouant un mouvement du concerto de Sibelius - sa musicalité m'a aussitôt séduit. J'ai consulté l'annuaire des pages blanches et j'ai découvert qu'en plus à l'époque j'habitais le même arrondissement à Paris. Je l'ai appelée, on s'est vite vu et nous avons joué la première sonate de Brahms pour faire connaissance. c'était à l'automne 2008... et tout doucement on a eu quelques engagements, festival de Menton , Uzerche , Cullyclassic en Suisse et cela nous a encouragé à avancer dans des nouveaux projets .
Ce disque est le premier disque d'Elsa Grether, avez-vous contribué aux choix du programme ou est-ce elle qui l'a totalement défini seule sans vous demander votre avis ?
Je n'ai aucunement contribué au choix du programme, Elsa m'en a parlé de son idée, j'ai pris mon temps pour lire cette musique car ce n'est vraiment pas le genre de musique qu'on peut jouer si vous ne vous découvrez aucune véritable affinité et quelques jours après, je me suis embarqué.
Elsa Grether indique avoir eu un choc intense la première fois qu'elle a entendu les sonates de Bloch et avoir été touchée par l'humanisme, la générosité et la sincérité de celles-ci, avez-vous eu également un tel sentiment, et quand avez-vous découvert ces sonates ?
Ce qui m'a semblé fortement perceptible dans cette musique encore plus que la spiritualité dont elle est imprégnée c'est la recherche d'une spiritualité ! Mais pas une recherche passive , il s'agit une recherche désespérée, tumultueuse, obsessionnelle , vitale .
Ernest Bloch a composé quelques oeuvres pour le piano , les connaissez-vous et qu'en pensez-vous par rapport à ses oeuvres de musique de chambre ?
Je ne suis pas sensible à ses oeuvres pour piano, l'inspiration de ces sonates pour violon me semble considérablement plus importante, plus expressive.
L'auteur de livret, Harry Halbreicht, indique que « avec une oeuvre aussi extrême [que la sonate 1] , Bloch sentit qu'il avait dépassé les limites de son public et ses interprètes et décida d'écrire une seconde sonate plus détendue et paisible » . En temps qu'auditeur et qu'interprète partager vous le sentiment du compositeur que cette sonate n°1 dépasse encore aujourd'hui les limites du public et des interprètes , où n'est-ce plus le cas aujourd'hui ?
'J'ai une préférence pour cette première sonate, très surprenante, d'une grande force et diversité, ca déborde un peu , comme si le contenu serait bien trop important pour le contenant , on ne saisit pas toujours la direction. Mais peu importe , on doit se laisser entraîner dans son courant.
Après, pour la question des limites du public , je ne sais pas , il ne faut ni sous-estimer , ni surestimer le public. Si vous croyez vraiment à quelque musique que ce soit sincèrement et vous mettez en oeuvre toute votre énergie pour transmettre, partager votre passion il y a des chances qu'on vous suive . Deuxièmement , je pense personnellement qu'il est important de construire le programme d'un concert de telle façon qu'il n'y ait pas que des oeuvres "difficiles" ou du même langage. Ça m'a frappé, mais voir dix Madonnes empilées dans une salle de musée ne me fait ni chaud ni froid , alors qu'en voir une seule dans une petite église m'a véritablement ému.
On peut remarquer que le disque commence par la seconde sonate d'ailleurs ... que pensez-vous des qualités de cette seconde sonate et savez-vous pourquoi Elsa Grether a choisi de jouer ses sonates considérées par l'auteur comme un diptyque , dans le désordre ( à savoir le monde tel qu'il devrait être et le monde tel qu'il est et non l'inverse . Cette sonate est titrée « Poème mystique » , un titre qui « s'imposait « explique l'auteur de livret, partagez- vous cet avis ?
La seconde sonate a été écrite pour mettre en paix la première. Elle la complète , la continue , nulle trace de la violence de début de la première sonate . Ici le ton est apaisé et explore , célèbre l'harmonie dans l'univers à travers de la foi . Elsa préférait que l'auditeur entre dans cet univers comme dans une forêt , en s'enfonçant peu à peu sur un chemin de terre et pas en plongeant directement sur le versant abrupte de la première sonate, c'est pourquoi on commence avec la deuxième . Poème mystique c'est effectivement l'intitulé très inspiré de la deuxième sonate, ça semblait naturel qu'il devienne aussi celui du disque.
Entre les deux sonates Elsa Grether a choisi d'insérer « Nigun », extrait d'une oeuvre composé peu de temps avant la seconde sonate en fait, et qui a eu un grand succès à l'époque , que pensez-vous plus particulièrement de cette pièce et en quoi cela vous semble-t-il intéressant de l'incorporer entre les deux sonates ?
Nigun , si on peut dire , c'est le tube de Bloch , une belle pièce que les violonistes jouent le plus souvent , je crois qu'elle ne pouvait manquer de ce disque .
Plutôt qu'une autre pièce de Ernest Bloch c'est une oeuvre d'un autre compositeur, Arvo Pärt dont la musique est certes d'essence mystique qui termine le disque pourquoi ce choix plutôt qu'un autre pièce d'Ernest Bloch ?
Elsa pourra répondre à cela...
Et voici donc la réponse d'Elsa Grether qui en profite pour nous en dire un peu plus sur l'ensemble comme cela lui a été également demandé... !
J'aime beaucoup "Fratres", en particulier dans cette version violon-piano (de 1980) et malgré les grandes différences esthétiques avec Bloch, je retrouvais dans cette oeuvre une même ferveur, densité, atmosphère méditative que dans la 2e Sonate "Poème mystique" d'Ernest Bloch, bien que plus crépusculaire. L'essence de ces oeuvres, l'élan de l'homme vers un ailleurs, un idéal spirituel, est similaire et d'une force profonde.
J'ajouterai que je suis ravie que Ferenc ait accepté de partager ce voyage, car c'est bien d'un voyage dont il s'agit. Son jeu toujours inspiré, profond, fluide et chaleureux est un bonheur.
Nous avons récemment donné ce programme au Festival de musique sacrée de Perpignan avec le comédien Daniel Mesguich, qui a lu des textes de Michel-Ange, Khalil Gibran, Teilhard de Chardin, Ibn'Arabi, se rapportant aux oeuvres. C'était une expérience émouvante et très enrichissante, que nous espérons pouvoir renouveler souvent ! Nous donnerons également un programme inspiré de celui du CD le 23 juin à 17h à la Synagogue de Mulhouse (68) et le 25 juin à 16h aux Flâneries musicales de Reims.
Quel est le rôle particulier du pianiste dans ces quatre oeuvres ?
L'écriture est très généreuse, très chargée pour le piano, l'équilibre à trouver avec le violon n'est pas évident . Puis il utilise beaucoup les arpèges, entre triple piano et double forte, comme une sorte de tapis harmonique ou alors pour donner un souffle, une respiration intérieure de la musique. Là aussi, il est important de les concevoir dans la diversité des caractères qu'on veut leur prêter, on peut les imaginer plus aérés, comme des courants d'air, plus aquatiques, des vagues , plus incandescents etc .. on a le choix , tout sauf l'uniformité de traitement qui les rendrait vite étouffants.
Vous aviez indiqué lors de notre précédent entretien que vous aviez « de plus en plus le besoin de faire de la musique de chambre, non pas seulement avec des partenaires occasionnels, mais surtout avec des rencontres sur la durée qui permettent d'élargir la rencontre musicale à une rencontre humaine. Cela suppose une véritable entente et complicité». Cette complicité est-elle telle avec Elsa Grether et qu'en est-il aujourd'hui, jouez vous surtout de la musique de chambre et avez-vous aussi des projets de disque au piano seul ou avec orchestre ?
Avec Elsa on a pris le temps de travailler ce répertoire, donner en concert, retravailler, redonner, en rajoutant à chaque fois une couche supplémentaire dans la compréhension ou réalisation du texte. J'espère qu'une certaine complicité liée à tout cela sera perceptible aux auditeurs . Oui , je joue un peu plus de musique de chambre qu'avant , je me réjouis . Il y a aussi la très bonne collaboration avec la violoncelliste Laura Buruiana ,une intégrale Mendelssohn sortira en avril chez Coviello Classic . puis en mai un disque avec le groupe hongrois de musique traditionnelle "Cifra " , un programme où je joue plusieurs rhapsodies de Liszt et eux du folklore tsigane -hongrois dont l'inspiration n'est pas étrangère aux rhapsodies . plus tard sortira un enregistrement live du festival Juventus de Cambrai des variations Diabelli de Beethoven . dernière folle envie :travailler avec des chanteurs !!! Je viens de rencontrer une merveilleuse soprano , Maya Villanueva et on s'est tout de suite "trouvé" musicalement , notamment dans une sensibilité et passion pour le répertoire espagnol et argentin, allant des pièces pour piano et mélodies de Padre Soler ,de Falla ,Mompou ,Turina à Ginastera Piazzolla ou Guastavino .
Quels sont vos prochains concerts avec Elsa Grether et autres concerts ?
Avec Elsa nous venons de jouer à Bruxelles , Perpignan -Festival d'art sacré , on jouera le 25 juin aux Flaneries de Reims . Fin mars j'ai joué en récital à l'institut français de Londres au festival "It's all about piano ", 17 avril je donnerai un récital à Saint Brieuc, les 18 et 19 à Cherbourg , le 24 avril avec Laura Buruiana à Goethe -Institut à PAris , le 26 avec Ophélie Gaillard à Bourges ,au théâtre Saint-Bonnet .

Pour écouter
Ernest Bloch
sonate n°1 (extrait du premier mouvement)
Elsa Grether, violon
Ferenc Vizi, piano
avec l'aimable autorisation
du label Fuga Libera

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et après le cadre à voir le teaser du disque
avec un plus long extrait de la sonate n°2
"Poème mystique"

 

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A écouter BLOCH - Sonate pour violon et piano - Elsa Grether et Ferenc Vizi - Poème mystique - Teaser

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